Sadek et la problématique de l'identité

Sadek et la problématique de l’identité (1/3)

Au vu des nombreuses sorties de cette rentrée des classes 2018, on constate une fois de plus que le rap épouse des formes plurielles et s’extrait du bitume froid et réaliste auquel il est souvent associé. Si cette musique reste un art prolétaire, ou de fils d’immigrés, comme le dirait La Rumeur, il n’empêche que ses interprètes cherchent à se définir et à se raconter autrement.

Sadek n’est plus ! Lui qui dans sa forme la plus brute était un rappeur lambda à l’imagerie calquée sur le clip de « Pour ceux » (comme tant de rappeurs français) s’est complètement réinventé ces dernières années, comme pour marquer sa différence et mettre en avant d’autres facettes de sa personnalité.

Libéré de ses interdits moraux à la sortie du film de Rachid Djaïdani, Le Tour de France, le rappeur de Neuilly-Plaisance laisse la bienséance au placard et réalise, épaulé par le photographe Fifou, l’une des covers les plus étonnantes de la décennie avec Vulgaire, Violent et Ravi d’Être Là. La suite n’est pas moins surprenante avec Johnny de Janeiro.

Cette fois-ci, Sadek se crée même un nouveau blaze inspiré du Brésil, tout comme les sonorités de l’album. Derrière la bonne blague, la rythmique endiablée de la funk brésilienne et les litres d’alcools ingurgités qui s’entendent parfois sur le disque, Sadek met le doigt sur un phénomène très français : celui de l’arabe issu de cités HLM refusant les clichés avec lesquels il se retrouve systématiquement associé et choisissant donc une nationalité d’emprunt – la plupart du temps latino-américaine .

En empruntant les traits de Johnny de Janeiro, Sadek devient ainsi un symbole de ce conflit identitaire souvent tu dans la culture populaire, à l’instar de Tahar Rahim dans le long-métrage Samba sorti en 2014. Cela n’était sans doute pas le but premier de cet album que de mettre en lumière cette situation, mais elle met d’autant plus dans l’embarras tous les rappeurs français « LV2 Espagnol », soit ceux qui improvisent un titre « zumba » atroce sans aucune connaissance de la culture latino-américaine.

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