Gros Mo et la problématique de l'identité

Gros Mo et la problématique de l’identité (3/3)

Au vu des nombreuses sorties de cette rentrée des classes 2018, on constate une fois de plus que le rap épouse des formes plurielles et s’extrait du bitume froid et réaliste auquel il est souvent associé. Si cette musique reste un art prolétaire, ou de fils d’immigrés comme le dirait La Rumeur, il n’empêche que ses interprètes cherchent à se définir et à se raconter autrement.

Vous souvenez-vous du surprenant EP intitulé Fils de Pute de Gros Mo ? Bien que peu porté sur le relationnel, le projet nous présentait un rappeur plutôt médiocre mais au charisme exceptionnel. Malgré ses nombreux défauts, celui que l’on connaissait comme étant le backeur du génial Nemir s’était fait une belle place dans le paysage des chineurs de rap français.

Son deuxième projet, un peu bâclé et peu ambitieux selon ses propres dires est plus difficile à entendre, notamment à cause de nouvelles sonorités mal amenées et de rimes difficiles à défendre. D’un naturel plutôt détendu, Gros Mo aime s’amuser de sa pilosité faciale généreuse et de la peur qu’elle véhicule tout en étant fasciné par la magie noire et les sciences occultes. Il n’en fallait pas plus pour que les théoriciens du complot fassent de lui un suppôt de Satan. C’est toujours plus facile d’être décrit de la sorte quand on fait du rap et qu’on porte une longue barbe.

Avec Les Étoiles, sorti le 28 septembre 2018, Gros Mo se présente de façon bien plus sensible, heurté par une relation amoureuse semblant s’être mal terminée. L’errance physique du rappeur de Perpignan a une bande-son taillée sur-mesure par son producteur En’Zoo. Elle mêle les musiques latines contemporaine à la soul des années 70 et ne s’inscrit dans aucune mouvance musicale actuelle ou passée.

La cover, réalisée par l’illustrateur Bouherrour, imagine Gros Mo en personnage d’un furyo japonais et participe à l’expérience d’extraction de la « vie réelle » que nous subissons en tant qu’auditeur. Gros Mo, En’Zoo et Nemir, présent sur deux titres, ont réussi à développer une musique qui leur est tellement propre qu’elle ressemble à leur passeport. C’est assez beau de les voir s’épanouir comme ils le font dans Les Étoiles et cela rappelle que la musique est une forme d’expression précieuse qui parle plus que n’importe quelle case sociétale réductrice.

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