Review de l'album "Trop tôt pour mourir" de Dosseh 2022

Dosseh : “Trop tôt pour Mourir” l’album ultime ?

Depuis la sortie du troisième album de Dosseh “Trop Tôt Pour Mourir” , je vois une presse dithyrambique à propos du projet. Ecoutant le rappeur d’Orléans depuis de nombreuses années, j’étais très curieux de découvrir ce projet qualifié de personnel. Toutes les lignes que vous lirez relèvent d’un avis personnel sur l’album et non d’une remise en question du talent de Dosseh qui n’a plus rien à prouver au rap français. C’est un billet sur mon avis et non celui de Kiasm.

Une carrière qui a mis du temps à décoller

Dosseh se catégorise comme un rappeur venant de la Province et du 45 Orléans plus précisément. Il rappe depuis bientôt 20 ans et possède à son actif 9 mixtapes, 1 EP, 3 albums et une réédition. Une carrière qui l’a vu lâcher une première mixtape dès 2004 au côté de son frère Pit Baccardi mais aussi de toute une scène underground comme K.Ommando Toxik, Stereo Blackstar ou J-Money. Des années à charbonner aux côtés de grands noms ou de futurs grands noms du rap français : Médine, Ol Kainry, Lino, Rim’k, Niro, Sofiane…

Il faudra attendre 2015-2016 pour commencer à ce que Dosseh se fasse un nom auprès du grand public rap français grâce à certains morceaux présents sur “Perestroïka” et “Yuri” son premier album et premier succès commercial. Malheureusement, les morceaux retenus par le public sont principalement en featurings et ne rendent pas hommage à son talent en solo “Coup du Patron” feat Gradur & Joke, “Infréquentables” feat Booba ou “Putain d’Epoque” feat Nekfeu. Il faudra attendre la sortie de son second album “Vidalo$$a” pour que Dosseh devienne un artiste majeur grâce au tube de l’année 2018 “Habitué” et à d’autres titres comme “A Chaque Jour” dont le clip est sublime.

3e album : “Trop Tôt Pour Mourir”

Après 3 ans d’absence de projets, je ne compte pas “Yuri Negrowski” qui est une compil de morceaux dispo sur YouTube, Dosseh annonce être de retour avec son troisième album “Trop Tôt Pour Mourir” . Là où le précédent était un blockbuster, celui-ci se veut intimiste car les expériences de vie vécues par le rappeur ont influencé son art et l’ont orienté vers quelque chose de beaucoup plus personnel comme en témoigne le long teaser “La peau de l’ours” publié en juin dernier. Le premier extrait “RS-28” est une démonstration de rap où il plie l’instru de DST The Danger & Iksma. On peut déjà être rassuré, pour ceux qui en avaient besoin, il est toujours un bête de rappeur.

Le 2e extrait en feat avec Lacrim “Amsterdam” va me laisser beaucoup plus perplexe. Après avoir repris la comptine “3 P’tits Chats” avec Dinos sur “Summer Crack Vol.4” le voilà qui reprend “Amstramgram” pour un résultat assez moyen. Un air de déjà-vu mais bon c’est un single. Soit, passons au dernier extrait “Branché” feat Momsii signé sur le label du producteur de Dosseh. Si le storytelling déchire, le jeu d’acteurs au début du morceau est assez catastrophique et apporte beaucoup de lourdeur au titre, on aurait préféré entrer direct dans la track, qui au passage est plutôt efficace.

Entre masterclass et incompréhension

Pour faire le relou, je vais commencer par ce que j’ai moins aimé. Quand on vend un album qui représente Dosseh, je trouve que le choix des invités laisse un peu à désirer et est au contraire très impersonnel. Si la présence de Dinos et Lacrim est logique au vu de leur relation via leur manager, on retrouve un casting assez similaire à ce que l’on peut retrouver sur les albums de rap sortis ces 10 derniers mois.

A part le feat avec Zed “Smooth Criminel” que j’ai trouvé très frais et celui avec Werenoi, les autres connexions sont facilement oubliables voire même sont le gros point faible de l’album : l’enchaînement Leto, Lacrim puis Dinos à la suite n’apporte pas grand-chose au projet et les sons sont skippés quasi systématiquement pour ma part, tandis que celui avec Tiakola n’est clairement là que pour faire streamer.

Dès que Dosseh se retrouve seul sur un son, il se passe quelque chose. Les 4 premiers titres de l’album détonnent et “Djamel” est écrit d’une façon admirable. La façon de se mettre dans la peau de son ami victime des attentats est presque cinématographique, on vit chaque instant, on ressent chaque émotion. Le ton neutre sans larmoiement apporte une touche dramatique. L’hommage à sa maman sur “Fleur d’Automne” est un des plus beaux du rap français. Parler de sa mère est une vraie planche glissante, mais il réussit à nous livrer une performance belle et sincère. Un couplet unique sans refrain pour toucher l’auditeur en plein coeur.

Cover très minimaliste et réussie de l’album “Trop tôt pour mourir” réalisée par Fifou

Un corps d’album intéressant

Je me suis principalement axé sur les featurings ainsi que les morceaux qui ont fait parler grâce à leur thème. Je vais donc parler un peu plus du contenu de l’album. Ayant déjà fait un aparté sur les quatre premiers titres, dirigeons-nous vers “Caïman & Astrakan”. Dosseh a réussi sa vie, il peut se vêtir en conséquence. Le cuir et la fourrure sont synonymes de richesse, bien que la caïman soit connu pour sa qualité de cuir inférieure par rapport aux alligators ou crocodiles, la rime c’est important. Une démonstration d’egotrip, contant une partie du chemin parcouru jusqu’à aujourd’hui, accompagnée d’un refrain entêtant en franglais. “Mais bien sûr qu’c’est qu’du matériel, mais bref, c’est un autre débat” comme il le dit si bien dans la belle outro au couplet unique.

Tu veux savoir ce que Dieu pense de l’argent, regarde à qui il le donne

La Vie de César

De “Je Te Pardonne” qui s’adresse à un haineux à “Rien N’a Changé pour démontrer que malgré les années et le succès, il est toujours présent pour ses proches en passant par “La Vie de César” feat WeRenoi qui est un gros banger ou la leçon de rap sur “L’algorithme de Dieu” , l’album regorge de petites pépites. La quasi-totalité des morceaux solos est une réussite et je pense y revenir régulièrement dans les prochains mois. En termes de prod, avec un tel casting de beatmakers, même si on ne valide pas tout, on trouve forcément chaussure à son pied.

Conclusion

Vous l’aurez compris, je ne suis pas totalement conquis par “Trop Tôt Pour Mourir” . J’ai essayé de vous exposer les raisons. Ce n’est absolument pas sur le niveau de Dosseh mais plus sur les promesses autour de cet album. Pour un projet personnel, j’aurais aimé Pit Baccardi & Ppros plutôt que Lacrim et Leto. Cet album est pour moi au final assez similaire à ce que j’avais ressenti avec “Vidalo$$a”. Je vais piocher des titres mais pas écouter tout d’une traite comme j’ai l’habitude de le faire. 19 titres c’est beaucoup, surtout à notre époque et le risque de mélanger des morceaux plus ou moins qualitatifs est grand.

Bien évidemment, la qualité est présente et Dosseh est aussi bien un bon rappeur qu’un bon chanteur, mais je reste sur ma faim. Voilà j’ai essayé de synthétiser au mieux ma pensée. Je suis bien sûr ouvert à tout débat et discussion autour de l’album et c’est aussi pour ça que je l’ai écrit. Ca m’intéresse d’avoir votre point de vue sur ce projet très attendu car je ne vois globalement que des avis très positifs.

Le rappeur Orléanais n’en a pas encore fini et après une période de doute et d’absence est revenu en forme. Il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, il est trop tôt pour mourir.

On parle des projets les moins bons de certains rappeurs ici si ça t’intéresse.

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