Benjamin Epps - Vous êtes pas contents ? Triplé avis EP 2022

Benjamin Epps : triplé et polémique

« J’viens de là où tout le monde rêve d’avoir le cheval sur le capot, les petits frères veulent devenir El Chapo, les soeurs veulent le même cul que Catalina, les grands frères sont en prison comme Toto Riina » dès l’intro du dernier projet de Benjamin Epps, on sent qu’on ne va pas écouter un banal projet de rap avec la tentative de single et deux-trois couplets kickés. Le EP transpire le hip-hop aussi bien dans les intrus que dans les textes et cela n’a guère plu. Petit retour sur le rappeur, le projet et la polémique.

Plusieurs carrières en une

Né à Libreville en 1996, Benjamin Epps a grandi dans une famille où les grands frères rappaient. Comme beaucoup de ses compères, il commence le rap à l’adolescence sous le nom de Kesstate. C’est sous ce blase que sortira son premier projet en 2013 « On Est Tous Les Bests » en collaboration avec le rappeur gabonais Syanur. Quelques années plus tard, Kesstate va laisser sa place à Benjamin Franklin le temps de 2 EP « Noir » & « Paris N’est Pas Si Loin » .

Sa transformation finale arrivera autour de 2019 pour préparer la sortie du projet « Le Futur » où Franklin deviendra Epps. Un EP collaboratif avec le producteur Le Chroniqueur Sale l’année dernière et la sortie en début d’année de « Vous Êtes Pas Contents ? Triplé ! » .

La musique de Benjamin Epps nous renvoie aux heures de gloire du rap new-yorkais, de Biggie à Nas ou Jay-Z en passant par le Wu-Tang, on sent que le rappeur a assimilé les codes originaux du hip-hop : performance, battle, egotrip, visuels et style vestimentaire. Bien qu’on retrouve beaucoup de points communs entre lui et Westside Gunn notamment dans la façon de rapper, certains lui reprochent un timbre de voix très similaire comme s’il en était responsable, nous pensons cependant que cette similitude vient des influences communes des deux rappeurs. Du côté français, Benjamin Epps cite Lino comme influence majeure bien qu’on puisse imaginer que les X-Men ont également dû tourner dans ses oreilles.

Vous Êtes Pas Contents ? Triplé !

Les plus vifs auront directement compris l’hommage à Mbappé. Pourquoi ce joueur ? A l’écoute du projet de Benjamin Epps, on retrouve deux gros points communs : insolence et talent. Le ballon colle au pied de Kylian comme les phases à la bouche de Benjamin, les défenseurs se font casser les reins au grès des crochets du petit prince de Bondy là où le natif de Libreville balaye la concurrence au fil des flows et punchlines affûtés.

Les instrus, ici signées de la patte de Just Music Beats, Dayzel the Machine, Sperrow ou encore Jeanjass, ont également une place prédominante; il n’hésite pas à les laisser défiler à la fin des morceaux pour nous laisser le temps d’assimiler leur richesse. Alors oui, Benjamin se proclame king au fil des mesures et le champ lexical de la suprématie est très présent mais n’est-ce pas un des fondements du rap ? Ne cherche-t-on pas à être le meilleur dans son domaine ?

Me battre c’est comme essayer de mettre une b*te à Lala &ce (Lala je t’aime)

« Vous N’êtes Pas Contents ? C’est pareil »

« Vous Êtes Pas Contents ? Triplé ! » n’est pas qu’une superposition d’egotrip, c’est aussi le projet le plus personnel du rappeur d’origine gabonaise. On en apprend plus sur son passé notamment sur les taffs qu’il a exercé comme ramasseur de melons à Nîmes ou valet de chambre à Aix. De ses difficultés d’apprentissage qui lui ont fait passer le permis 5 fois, après en vrai ça m’est arrivé aussi c’est sûrement le signe des génies.

En dehors de ça, quel rappeur français peut se targuer d’avoir réussi à inviter le légendaire Jadakiss de The Lox faire l’intro et l’outro d’un morceau comme sur « Drillmatic » ? Vous l’aurez compris tous les ingrédients sont réunis pour passer un bon moment. Oui mais voilà, vous avez lu le titre et vous savez qu’on va parler de cette polémique…

Une des trois covers de l’EP de Benjamin Epps signée Armen Djerrahian

Big up à Naps, Jul & SCH

Dans l’avant dernier morceau de l’EP, Benjamin Epps va avoir une phase qui va énormément faire parler le FC Twitter : « les rappeurs sont déclassés par SCH, Jul et Naps » . Le rappeur s’est déjà expliqué à ce sujet en précisant qu’il n’était pas fan des trois artistes et qu’il avait l’impression de les entendre, à juste titre, de partout, sans pour autant dire que c’était un clash.

Là où tout le monde a vu de la jalousie, j’y ai plus vu un hommage à la célèbre punch de Booba qui l’avait validé par ailleurs. Et surtout est-ce faux ? Jul, Naps et SCH sont parmi les plus gros vendeurs du rap français donc d’un point de vue strictement business, ils déclassent beaucoup de monde. De plus, chacun dans leur domaine, ils sont de bons rappeurs. L’occasion de vous orienter vers notre chronique sur « Jvlivs II » .

Mais aujourd’hui tout va très vite sur les réseaux sociaux, on retient plus facilement ce qui touche son rappeur préféré que la performance de l’artiste lui-même et beaucoup ne laissent plus vraiment le temps aux projets de vivre vu le nombre impressionnant de sorties chaque semaine. Benjamin Epps a réussi a ramené une dose de fraîcheur dans le rap français en restant très Hip-Hop comme Zikxo ou Freeze ont notamment pu le faire auparavant et s’il peut faire parler de lui que ce soit en bien ou en mal, il reste fort à parier qu’il n’hésitera pas une seconde à sortir des punchlines encore plus polémiques à l’avenir.

Il est donc important de rappeler que l’essence du hip-hop c’est les battles, la revendication de sa supériorité sur les autres, la dénonciation et que si à l’heure actuelle le rap est d’une diversité sans fin, à mon plus grand plaisir, l’egotrip et les petites piques en font partie intégrante.

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