“Jungle” : Rap, drogue, effusion de sang dans un Londres futuriste

Septembre nous a offert une belle rentrée en séries et ce jusqu’à la fin du mois. “Jungle” vient tout juste de sortir et on a pris le temps d’y jeter un oeil. Que vous l’ayez vue ou non, vous ne devriez pas être spoilé.

Welcome to the jungle

Si tout le monde sait que la guerre des gangs fait des ravages en Amérique, certains n’ont pas conscience que la réalité est plus ou moins la même en Angleterre. Les gangs rivaux sont pléthores et les effusions de sang tout autant. Depuis quelques années, les règlements de comptes au couteau sont de plus en plus nombreux et les morts de plus en plus jeunes. En 2018, on comptait déjà une attaque au couteau toutes les 14 minutes… Je vous invite par ailleurs à visionner la géniale série documentaire de Streetpress à ce sujet.

Les deux réalisateurs Junior Okoli et Chas Appeti (Nothing Lost) ont eu pour projet de lier la musique rap et la vie de rue londonienne dans une série de 6 épisodes qui porte bien son nom “Jungle”. Disponible sur Amazon Prime Video depuis vendredi, elle a fait un peu de bruit en Angleterre, mais très peu en France voire pas du tout. Rien d’étonnant car le rap uk n’est pas le favori des auditeurs de l’hexagone. Puis, rappelons qu’avant sa sortie sur Netflix, “Top Boy” était elle aussi méconnue…

Pourtant, rien que le résumé donne plutôt envie si tant est que l’on s’intéresse au hip-hop et aux séries et que l’on soit un peu curieux; “La culture rap britannique vous présente un drame comme vous n’en avez jamais vu auparavant. Dans un Londres du futur proche, deux jeunes hommes tentent de sortir de la spirale du crime, mais sont contraints d’affronter les conséquences de leurs actes.”.

Welcome to the jungle, un monde où il ne faut faire confiance à personne, où tu risques ta vie à chaque déplacement et où la poussière d’or ruine des vies et des familles. Sans en dire trop, on y suit dans un premier temps Gogo (Ezra Elliot) et Slim (RA) dans une histoire de recel et de vengeance. Dans un second temps, l’histoire de Marcus (Poundz) dont la vie dérape lors d’une nuit et qui fait tout pour subvenir aux besoins de sa mère et surtout de son petit frère (Seyi Andes-Pelumi).

Un mélange d’univers

L’une des premières choses qui frappe lorsque l’on regarde “Jungle”, c’est l’univers visuel dans lequel le spectateur est plongé dès le premier épisode. Il fait nuit le 3/4 du temps et la ville de Londres s’éclaire de nombreux panneaux publicitaires, d’hologrammes et surtout de néons qui prennent place un peu partout, que ce soit dans les appartements, dans les rues ou les commerces.

Une inspiration cyberpunk un peu simpliste qui fonctionne. Surtout quand on regarde la série la nuit, il faut avouer que l’éclairage fait son effet ! Le côté rétro futuriste, avec des anciennes voitures, télés ou encore téléphones se mêlant à une technologie plus avancée, est lui aussi appréciable…

Malgré quelques défauts, la réalisation est plutôt qualitative, j’ai beaucoup aimé la façon dont sont filmés certains plans, les nuances de rouge et bleue des gangs ou des lumières (référence aux Bloods & Crips ?) ressortent bien à la caméra, la photographie est belle, les ralentis sont plutôt sympas également et apportent bien plus que dans la série “Les anneaux de pouvoir” par exemple. Je n’ai aucune idée du budget alloué, mais je doute qu’il soit si conséquent et donc difficile de reprocher quoi que ce soit car à maintes reprises on pourrait se croire dans un clip à gros budget et c’est de là que vient Chas Appeti à la base.

90% de rappeurs au casting

La seconde chose à côté de laquelle on ne peut pas passer, ce sont les passages qui surviennent à tout moment pour échanger quelques dialogues en rappant sur de la drill. Il suffit de jeter un rapide coup d’oeil au casting pour voir que ce dernier est composé principalement de rappeurs de la scène anglaise, plus ou moins bons dans leur rôle. Ainsi, ancienne et nouvelle école se mélange avec des noms comme RA, Dizzee Rascal, Rimzee, Tinie Tempah, Big Narstie, K Koke, Zems, Jaykae, Double Lz, Uknown T, M24, Skeamer, Poundz, mais aussi les chanteuses IAMDDB et enfin Amaria BB, qui vient apporter une touche de douceur dans le rôle de Bianca.

Bien qu’assez originale dans une série et que les rimes pleuvent, on s’y perd parfois dans le discours, et l’idée de “comédie musicale rap” n’est pas si nouvelle. On peut notamment retrouver ce procédé dans le film “Blue Story”, sorti il y a 2ans, qui conte lui aussi la guerre des couteaux en Angleterre et que je conseille par la même occasion.

 

 

 

 

 

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Les acteurs de “Jungle” lors de l’avant-première

Une écriture intéressante

Comme dit précédemment, les six épisodes sont séparés en deux histoires, et ces deux histoires sont séparées sous forme de chapitres avec des titres distincts comme dans un roman. Le tout raconté par un narrateur.

Si j’ai pu lire à droite à gauche que l’écriture de la série était faible, je pense qu’on n’a pas dû voir la même série et que ces derniers n’ont pas encore vu “Athena” (ouh la balle perdue). Rien que le dialogue de fin de l’épisode 3, qui ressemble à un “Notes pour trop tard” d’Orelsan, est mieux écrit. De plus, même si la série est loin d’être édulcorée, il n’est jamais question de glorifier la vie de rue. Au contraire, avec “Jungle”, on sent comme une envie de remettre les jeunes dans le droit chemin et de leur montrer le vrai sens de la vie, les deux réal’ venant eux-mêmes des quartiers de Streatham et Peckham.

#ThisIsJustNotAStory

Toujours dans l’épisode 3, dans une interview, Junior Okoli a dévoilé s’être inspiré d’une scène du film “Heat” avec Pacino et De Niro. Et, il reste fort à parier qu’il y a sûrement d’autres inspirations… Tout ça pour dire, que même si certaines intrigues méritaient d’être plus développées et mieux écrites puis que l’on aurait aimé en savoir plus sur certains persos également, on peut aussi voir ça comme une manière de laisser parler l’imagination des spectateurs, et à chaque épisode on arrive à ressentir l’implication des réalisateurs, aussi bien à l’écriture que visuellement.

Conclusion

A la fois similaire mais différente de “Top Boy” ou de “Snabba Cash” pour ne citer qu’elles, “Jungle” est une série passée inaperçue qui mérite plus de visibilité, même si elle est loin d’être parfaite et qu’elle divise la critique. Fictive et dystopique mais en même temps réaliste, elle vient s’ajouter à la liste des séries assez originales de la plateforme Prime Video d’Amazon. Il y a une certaine prise de risque qui pour moi s’avère payante.

Est-ce qu’il y aura une saison 2 ? En y réfléchissant bien, il y a matière à faire en racontant d’autres histoires, mais il y a fort à parier que non. Si tel est le cas, ce sera intéressant de voir comment certains protagonistes vont être développés. Si vous aimez le rap et les séries/films, l’année dernière on a publié un article complet sur les programmes avec des rappeurs.